Akiko ❂ Hydromel

TW : Manipulation, sévices physiques, abus sexuels, pensées noires, état psychologique critique, bref, rien n'est joyeux

Papier froissé - larmes salées. Poignée de cheveux au sol, parfois virevoltent quand le ventilateur tourne en leur direction - jusqu'à s'éparpiller. Genoux écorchés - à terre et à vif, renifle à nouveau - mais plus rien de coule désormais. A sec, puit est vidé - de toute énergie, de toute envie, de tout espoir. C'est l'été mais pour la jeune femme, c'est l'enfer. Démon pour la maintenir dans ce cauchemar éveillée - héros dont le masque tombe dès lors qu'il passe le pas de la porte, bel appartement payé par la popularité de celui dont elle aurait voulu oublier le nom. Plus maintenant. Imprimé - indélébile dans l'esprit - terreur est devenue conviction - et le patronyme obsession. Papier mouillé - quelques lettres dressées, divaguant - explications bancales d'un acte que jamais elle ne réaliserait - ni cordage, ni taillade. Parchemins brûlés, demoiselle n'a jamais eu le cran de renoncer complètement - ou peut-être n'était-elle finalement pas assez cassée. Seule violence s'est manifestée contre lui - un soir, où la lame transperça la chair plusieurs fois. Plus belle victoire - celle d'avoir d'elle-même défait ses chaînes.

Grand et svelte - déjà au collège, les filles parlaient du nouvel élève, un an plus vieux, à l'alter de feu, qui ne tarderait pas à devenir héros. L'année d'après, ils se sont rapprochés, puis l'année suivante, c'était le grand amour. L'amour comme on le vend dans les films à l'eau de rose. Akiko n'a jamais été la plus intelligente, mais elle a toujours été bien entourée - pas grâce aux mots maladroits, mais par la tendresse, par les sourires timorés et la simplicité. Par l'aura manifeste, sucrerie addictive qu'elle peinait à atténuer à l'époque. Mais lui - ce garçon - ne semblait affecté que par la personnalité - c'est le genre de promesses qu'il donnait pour l'amadouer. Naïveté bernée, combien de ses amies a-t-il sautées ? Mais l'amour rend aveugle et aussitôt le lycée terminé qu'elle emménage chez celui qui déjà avait un nom. Les premiers temps sont toujours doux, et petit à petit on s'éloigne des parents protecteurs. Des petites disputes éclatent avec les proches, parce qu'ils ne comprennent pas toujours les décisions - comme celle d'arrêter les études - et le travail à temps partiel, pour ne s'occuper que de la maisonnée - que de lui.

Et puis un jour, il demande une petite faveur - un peu d'aide sur une mission, avec un cheveu, puis une goutte de sang. Et puis plus régulièrement, elle s'offre toute entière - parce qu'ainsi elle est utile et que d'une certaine façon, ça lui donne l'impression d'être une héroïne elle aussi. Jusqu'à ce qu'il prenne. Sans plus demander. Jusqu'à ce qu'il force. Sans s'inquiéter. Jusqu'à ce qu'il use et abuse - épuise et détruise. Que les lambeaux s'envolent et les marques ne disparaissent plus, que les entailles deviennent cicatrices et le corps ressource à exploiter - jusqu'à ce que son nom à la télé n'hante même lors des absences indéterminées. Et Akiko restait là, sagement, à l'attendre dans l'appartement. Amant est tortionnaire - mais c'est par amour du métier qu'il fait tout ça - n'est-ce pas ? On trouve des excuses, des explications - œillères toujours masque le visage du démon, et les ténèbres s'emparent un jour de l'esprit - on ne sait plus vraiment qui on est - comment on s'appelle. Il ne reste qu'un prénom, mais c'est celui d'un autre.

Le diable s'appelle Takumi.

Akiko a oublié bien des choses - au fond pas vraiment, mais les efforts que ça lui demanderait pour se souvenir sont bien trop grands. Elle a préféré laissé place à la colère - ô, si ce n'était que ça - haine viscérale qui s'enraille dans les entrailles, place laissée par la folie qui, un soir, l'aura amenée à transpercer plusieurs fois le concubin fauteur - le diablotin abuseur. Il a survécu - elle a fuit. Et même si cela a remué le quartier, l'affaire fût très vite enterrée - parce qu'après tout, un héros fort apprécié y était mêlé - et que la jeune femme avait disparu. Hakkaido quittée - enfant devenue dame se retrouve un patronyme, quelque part dans l'immensité de Tokyo, elle s'engouffre dans les ténèbres. Les faux papiers ressemblent aux vrais - on est pas trop regardant comme elle a cette douceur de ceux qui font de leur mieux - que la lueur a disparu - et que ça donne envie de tendre une main à l'âme meurtrie.

Sauf qu'Akiko ne veut plus être la jeune fille trop gentille - la petite princesse à sauver - et qu'elle ne croit plus en l'héroïsme de ces hommes qui ne cherchent que la popularité. Ses espoirs se tournent vers ceux qui les critiquent - vers Stain, donc les actes sont sans doute un peu trop violents à son goûts mais dont le discours lui parle. Vers la ligue des vilains, qui ne sont pas si vilains - qui n'ont juste jamais trouvé leur place - à qui on a tourné le dos trop souvent. Seuls - ensemble à présent. La blonde s'endurcit petit à petit - apprend doucement à se servir de son alter qu'elle maudit parfois, trouve un job de serveuse au Mighty Meow pour payer le studio confortable, ressort l'appareil photo pour, les jours creux, se faire paparazzi en vendant les photos des héros qu'elle répugne aux plus offrants - et ainsi emmagasiner quelques informations sur eux pour la cause.